1870. La guerre franco-prussienne à Morlaix

Il y a 150 ans éclatait une guerre qui allait provoquer la chute du Second empire et l’arrivée de la Troisième République. Pour Morlaix, pourtant loin du front, les conséquences seront inattendues.

 

Le 19 juillet 1870, l’Empire français déclare la guerre au royaume de Prusse. Étrange mois de juillet à Morlaix où, dans l’insouciance, les habitants se pressaient aux courses hippiques, au feu d’artifice, aux bals, à l’illumination du viaduc, avant de crier "À Berlin !" dans l’enthousiasme général de la déclaration de guerre.

Témoin de ce climat particulier, les archives de la ville de Morlaix conservent dans la sous-série 1 H les registres des engagements volontaires entre 1820 et 1884, à raison d’un
registre par année. Mais pour la seule année 1870 nous conservons dix registres ! 260 jeunes morlaisiens s’engagent ainsi entre juillet et décembre 1870. On y apprend qu’au matin du 21 juillet, le jeune Ivan Le Gac de Lansalut (il a 18 ans) est le premier à s’engager volontairement dans le 13e régiment d’infanterie de ligne.

Ces registres se révèlent précieux pour ceux qui s’intéressent à la généalogie. On y retrouve l’identité des parents, une description physique, une profession, etc. Ils permettent surtout de retracer des destinées individuelles. François Croguennec s’engage pour la durée de la guerre au 59e régiment d’infanterie de ligne le 12 août 1870. Agé de 20 ans, il est tonnelier. Il décédera le 21 mars 1871 à l’Hôtel-Dieu de Poitiers. Après la capitulation de Sedan, son régiment est chargé de défendre le château de Buzenval, les ponts de Billancourt et de Saint-Cloud. Le 30 septembre, il combat à Villejuif et à l’Haÿ. Le 19 janvier à la bataille de Buzenval, le régiment perd 460 hommes. On ne sait pas si François fait partie des blessés soignés à Poitiers.

guerre franco prussienne 2

Mais "l’héritage" le plus surprenant de cette guerre sur la vie des Morlaisiens est à lire dans les registres de délibérations de l’époque. Le 13 septembre 1870, le maire s’alarme de l’impossibilité de trouver des fusils de bonne qualité pour équiper "promptement" la Garde nationale et ainsi soutenir le gouvernent de défense nationale. Il propose même de déléguer quelques-uns des membres du conseil municipal pour se rendre en Angleterre et ainsi entrer en contact avec des armuriers et ceci au mépris de la loi internationale sur l’exportation des armes. Hélas tous les manufactures en France et en Angleterre sont dans l’impossibilité de fournir les 1 500 fusils demandés par les officiers de la Garde nationale. Le maire propose d’emprunter 50 000 F à un taux d’intérêt de 6 % faute de mieux et d’appeler au patriotisme des habitants les plus aisés. Cette emprunt est porté à 150 000 F en novembre pour assurer également l’habillement et l’équipement de la Garde nationale. Cet effort financier va longtemps peser sur la commune dont "’économie normale s’est trouvée atteinte (...)".

A la fin des années 1880, la municipalité de Morlaix cherche à annexer le quartier du Troudousten de Ploujean pour améliorer la perception de l’octroi et ainsi assainir les finances
communales. On est en droit de se demander si cette volonté d’annexion trouve ses origines dans les tourments de la guerre franco-prussienne 20 ans plus tôt...

 

Archives municipales de Morlaix

 

Illustrations :

1. Une batterie française pendant la guerre de 1870. Source : Wikimedia Commons

2. Extrait de l’acte d’engagement volontaire de François Croguennec, 12 août 1870. Source : registre des actes d’engagement volontaire, n°1, 1870, 1 H 57. Archives municipales de Morlaix