27 septembre 1891. L'inauguration de la ligne Carhaix-Morlaix
Il y a 130 ans était inaugurée la ligne de chemin de fer entre la capitale du Poher et la cité trégoroise. C’est l’occasion de revenir sur l’une des facettes du riche passé ferroviaire de Morlaix.
Quand on pense au train à Morlaix, on pense au viaduc, à la gare principale, à la ligne entre Brest et Paris. Mais il y a plus de cent ans des trains prenaient les directions de Roscoff, Saint-Pol-de-Léon, Plestin-les-Grèves, etc. Et donc de Carhaix. Morlaix était un nœud ferroviaire dans le nord-Finistère.
Au début des années 1870 se pose la question d’une communication ferroviaire vers le centre Bretagne. Morlaix étant considéré par certains défenseurs du projet comme le lieu d’écoulement naturel des productions carhaisiennes. En juillet 1880 une enquête d’utilité publique est ouverte. Une gare est prévue sur le plateau Saint-Martin, permettant de la raccorder à la ligne de Brest à Paris. Une seconde, celle de Morlaix ville, est projetée sur le champ de foire du Pouliet pour desservir le port via le centre-ville. Le terrain serait cédé gracieusement à l’État. Une cession qui alimente les débats du conseil municipal de l’époque : certains élus regrettent la rapidité de la prise de décision et surtout la disparition « d’une promenade la plus agréable de la ville » et du « seul terrain (…) où puissent se tenir à proximité du centre les foires et expositions, exercices et revues de la garnison, fêtes (...) ».
Mais la marche du progrès de fait pas de sentiments. Les enjeux commerciaux de l’arrondissement et l’intérêt général l’emportent. La cession gratuite est votée en août 1880. Témoin de l’âpreté des discussions de l’époque : le mois suivant 7 conseillers municipaux, dont le bouillonnant Armand Cloarec, opposés au projet de gare au Pouliet démissionnent pour dénoncer un vote fait dans l’urgence sur une « proposition vaguement formulée » et de surcroît en l’absence du maire malade. De plus le passage de la ligne dans le centre de la ville serait « désastreux » et priverait les morlaisiens de leurs rues et places. Malgré tout en juillet 1881 la ligne de Carhaix à Morlaix est déclarée d’utilité publique. Le tracé est approuvé le 12 mai 1882. Les travaux vont s’étaler sur près de 10 ans. Entre temps le projet controversé de gare au Pouliet est abandonné. L’ingénieur estimant en 1887 que le transport d’une tonne de marchandise depuis le port est trop coûteux et serait « une cause de gêne sérieuse pour la circulation dans les rues et sur les quais ». Le champ de foire est rétrocédé à la ville l’année suivante. Mais « l’affaire » du raccordement de port à la nouvelle voie par le Pouliet va continuer à agiter les esprits pendant encore 10 ans.
En septembre 1891 invitation est donnée à M. Yves Guyot, ministre des travaux publics, de venir inaugurer la nouvelle voie de chemin de fer. Les festivités sont fixées aux 26 et 27 septembre : retraite au flambeau le samedi soir, illumination de l’hôtel de ville et de la place Thiers, concert de la musique municipale et danses publiques jusqu’à minuit ! Un banquet pour 150 invités est organisé le dimanche : le menu, bien fourni, balance entre poésie et gastronomie : consommé livonienne, cantaloups glacés, filets de bœufs à la Godard, gratins de homards sauce brésilienne, timbales Montmorency, etc.
La voie est officiellement ouverte le lendemain. Elle fermera définitivement le 9 avril 1967.
Illustrations : 1) Train de Morlaix-Plestin-Les-Grèves, vers 1915 ; 2) Train de Morlaix-Plestin-Les-Grèves, vers 1915 ; 3) Le Pouliet vers 1890-1900
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