1842. Le percement de la rue de Paris
Au début du XIXe siècle la ville de Morlaix est traversée par des voies de communication importantes, notamment la Route Royale n°12 de Paris à Brest. Le voyageur, téméraire, venant de Brest, de Paris ou de Quimper, doit se préparer à amorcer une descente périlleuse vers les ruelles exiguës du centre-ville (notamment rue des Nobles ou rue du Mur). « Dieu nous préserve du voyage » aurait pu dire le voyageur en reprenant ce vers d’une fable de Jean de La Fontaine (Le chartier embourbé). Dans les années 1820 la cité souhaite mieux accueillir ses visiteurs.
En mai 1828 la municipalité se plaint de la lenteur des Ponts-et-Chaussées pour lancer le projet de nouvelle traverse des routes royales. Le maire en appelle au député du Finistère. Les habitants attendent depuis trop longtemps de « jouir des avantages que doit leur présenter les nouvelles traverses projetées ». Cette nouvelle traverse de la Route Royale n°12 permettra en outre à la ville de se développer sur les bords du Jarlot et de remédier une bonne fois pour toute aux difficultés et aux dangers des traverses actuelles. « Des événements malheureux » en témoignent journellement selon le maire. Mais la ville ne dispose pas des crédits suffisants pour concrétiser son vœu.
Deux ans plus tard les édiles renouvellement leurs vœux. Le projet de nouvelle traverse ne saurait attendre plus longtemps devant l’état de dégradation des rues des Nobles et du Mur « dont le pavage est complétement détruit par le passage du roulage général ». Le maire fustige « l’incurie » des Ponts-et-Chaussée accusés de ne pas procéder aux travaux nécessaires. Le percement de cette nouvelle traverse « allant de la place des Jacobins jusqu’au pont du Pouliet » est « constamment ajourné » sans doute, selon le maire, par l’absence de responsables des Ponts-et-Chaussées à demeure à Morlaix. La ville se sent délaissée… En 1833 des habitants du bord du Jarlot sur lequel doit passer la nouvelle traverse protestent contre le projet. Les arguments des pétitionnaires sont irrecevables pour le conseil qui rappelle encore une fois la nécessité de cette nouvelle voie qui occuperait de surcroît « une foule d’ouvriers qui avec leurs familles périssent de misère par l’insuffisance des constructions (…) ». Les années passent, les griefs s’accumulent, mais le projet est toujours remis.
Après encore quelques modifications et retards les travaux sont lancés en 1840 dans un espace quasi-vierge constitué de jardins et de tanneries. Fin 1842 la rue de Paris reçoit officiellement son nom. Cette nouvelle voie, outre le désengorgement de la ville, va permettre le développement de la partie sud de Morlaix : l’école du Poan-Ben est édifiée en 1852 dans les anciens jardins des Jacobins, la place de Traoulen prend sa physionomie actuelle.
Illustrations : 1) projet de tracé de la nouvelle voie ; 2) rue de Paris, vers 1905 ; 3) rue de Paris, vers 1905
© Archives municipales de Morlaix